L'Actu vue par Remaides : LaRude : « Il y a encore beaucoup de chemin à faire pour éduquer les gens sur le VIH »
- Actualité
- 25.02.2025
© Lisa Gloria Robert
Par Fred Lebreton
LaRude : "Il y a encore beaucoup de chemin à faire pour éduquer les gens sur le VIH"
C’est dans un café du Marais à Paris que nous retrouvons Christopher Delarue alias LaRude, le quasi anagramme de son patronyme. Auteur, compositeur et interprète, LaRude est en pleine préparation de son deuxième album solo. L’artiste, ouvertement gay et séropositif, se sert de sa musique pour faire passer des messages qui lui tiennent à cœur. Rencontre.
Remaides : Pouvez-vous vous présenter et présenter votre style en tant qu’artiste ?
LaRude : Je m'appelle Christopher Delarue et mon nom d'artiste est LaRude en un mot. Je suis auteur, comédien, chanteur, parolier pour des comédies musicales et des pièces de théâtre. En 2021, je me suis lancé en solo avec mon projet LaRude. J'en suis à mon deuxième album qui va sortir à la fin de l’année sur toutes les plateformes. J’ai aussi écrit des chansons pour d’autres artistes comme Rita Baga, une drag queen canadienne qui est également présentatrice de Drag Race Belgique. Elle va sortir un album distribué par Universal le 28 février. J'ai eu la chance d'écrire deux chansons pour elle dans cet album. Mon écriture est à la fois poétique et légère, mais j’aborde des sujets très durs la plupart du temps. Pendant longtemps, j'ai décrit ma musique comme de la « poésie coup de poing ». Mais je dirais aujourd’hui que c’est de la pop française mêlée à du rap parfois. Si je devais me situer parmi des artistes contemporains, ce serait peut-être Eddy De Preto, Fauve et Orelsan.
Remaides : Quels thèmes abordez-vous dans vos chansons ?
Je parle de sujets personnels, mais qui, je l'espère en tout cas, ont un minimum de résonance pour un public plus large. J'ai commencé sur mon premier album à parler par exemple de ma relation à mon père, de mes histoires d'amour, de rupture amoureuse. Mais il y a aussi des chansons plus joyeuses et légères et notamment une chanson qui parle de sexe sur mon deuxieme album. J'ai bientôt 33 ans et je vis une sorte de transition ou de crise de la trentaine. Je ne sais pas si ça existe vraiment, mais en me renseignant autour de moi, je me suis rendu compte qu'en effet, je n'étais pas le seul dans ce cas-là. Mon nouvel album parle de ça, de se remettre au centre de sa vie ou de s’écarter des personnes toxiques.
Remaides : Une de vos chansons intitulée « Passager clandestin » parle du VIH. Pourquoi avez-vous décidé de parler ouvertement de votre séropositivité dans votre album ?
J’ai contracté le VIH en 2018 et en parlant aux médecins je me suis rendu compte que je ne connaissais absolument rien à cette infection. J’ai été dépisté un mois après l’avoir contracté. J’étais en primo infection et le médecin m’a dit : « Vous savez, vous allez vivre aussi longtemps que moi, voire même plus vieux, parce que vous avez été dépisté et traité très rapidement ». En écrivant cette chanson, je me suis dit qu'il était important de rappeler aux gens que nous ne sommes plus dans les années 80 et que maintenant, avec toutes les avancées scientifiques, on peut vivre normalement avec le VIH. On a beaucoup de chance d'avoir accès à des traitements efficaces et j'espère qu’on va pouvoir mettre fin à cette épidémie.
Remaides : Aviez-vous connaissance du concept I = I (Indétectable = Intransmissible) avant d’être vous-même concerné par le VIH en 2018 ?
Pas du tout ! Non, j'avoue que je ne le savais absolument pas. Je suis passé à côté de cette information et je ne connaissais pas la Prep non plus. Peut-être parce que je ne fréquentais pas la communauté LGBT, les bars gays, etc. En apprenant ça, je me suis dit que c'est dingue parce qu'en en parlant aux gens autour de moi, je crois qu'il y a peut-être 1 % de mes proches qui connaissaient I = I. Et même encore aujourd'hui, sur des applications de rencontres comme Grindr, des gens te bloquent direct dès que tu leur dis que tu es séropositif. C’est vraiment idiot car il n’y aucun risque de contracter le VIH avec une personne séropositive sous traitement. Il y a encore beaucoup de chemin à faire pour éduquer les gens sur le VIH et c’est ce que j’essaye de faire à mon petit niveau par le biais de ma musique.
Remaides : Est-ce que, pour vous, en tant qu’artiste, le fait de parler ouvertement du VIH peut constituer un frein dans votre carrière ou au contraire une force ?
Je me suis beaucoup posé la question, même encore aujourd’hui avant de venir à cette interview. Je me suis dit sur la route : « Est-ce que je le dis ou est-ce que je ne le dis pas ? ». Une partie de ma famille ne le sait toujours pas donc il va falloir que je leur dise, mais en même temps ça me met un coup de pied au cul et c'est très bien. Je me suis dit que je ne pouvais pas à la fois écrire une chanson qui parle du VIH et rester caché. Je pense qu’à force de sensibiliser les gens autour de nous, c'est comme ça qu'on va faire bouger les choses. Que ça freine ou pas ma carrière, je m'en fous. Je suis là pour raconter des choses. S'il y a des gens à qui ça ne plait pas c’est dommage pour eux, mais ce n’est pas mon problème. Je fais partie de cette nouvelle génération de personnes séropositives nées dans les années 90. Nous n’avons pas connu l’horreur des années de cendres mais on continue de voir chez les gens autour de nous cette peur du sida. Il faut qu’on soit visible et qu’on explique la réalité du VIH aujourd’hui. Nous ne sommes pas des lépreux comme avait dit Jean-Marie Le Pen dans les années 80.
Remaides : Quels sont vos projets pour les mois à venir ?
J'ai un nouveau single qui sort le 21 février, qui est un remix de mon dernier single, intitulé « Cool Kid ». La chanson a été remixée par un artiste que j'adore qui s'appelle Elron. Il est israélien et fait de la musique électronique vraiment cool. Tous les deux mois, je vais sortir un nouveau single de ce nouvel album prévu pour la fin de l’année. Je vais me produire dans plusieurs Marches des Fiertés notamment à l'after Pride de Reims le 24 mai et celle de Nancy le 7 juin. Ensuite, je pense que je vais revenir avec quelques concerts parisiens, peut-être en septembre, octobre, je suis en train de programmer tout ça.
Pour suivre LaRude sur les réseaux sociaux et écouter sa musique.
Propos recueillis par Fred Lebreton
© Lisa Gloria Robert