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    L'Actu vue par Remaides : RN : un programme Santé qui fait la part belle aux discriminations

    • Actualité
    • 04.07.2024

     

    ame

    © DR

    Par Célia Bancillon et Jean-François Laforgerie

    RN : un programme Santé qui fait la part belle aux discriminations

    Dimanche 7 juillet aura lieu le second tour des élections législatives. Alors que l'extrême droite se rapproche dangereusement du pouvoir, la rédaction de Remaides vous propose de décrypter le programme santé du RN. Quelles seraient les conséquences d’un gouvernement RN pour les droits humains et la santé publique et notamment pour les personnes exposées au/ou vivant avec le VIH ?  Savoir = Pouvoir.
     

    Phase 1, phase 2

    Dans son programme des législatives 2024, l’extrême droite prévoit (dans l’hypothèse où elle est la force majoritaire et que la conduite du gouvernement lui a été confiée) d’articuler son action en « deux phases » et cela « conformément à un calendrier réglementaire, législatif et constitutionnel parfaitement maîtrisé ». Le programme explique que « la première phase viendra répondre à l’urgence sociale et sécuritaire » avec la constitution d’un gouvernement (si le RN emporte les élections), l’ouverture d’une « session extraordinaire » du Parlement et la mise en œuvre par voie règlementaire de textes jusqu’à l’automne. La deuxième phase est celle consacrée au budget. Au RN aussi, on aime bien les formules ronflantes puisque cette période budgétaire (dixit le programme) « intégrera notamment toute l’articulation fiscale puis, dans la foulée de ce vote annuel, une construction législative permettant de mettre en œuvre les réformes de fond ». Ça vend du rêve. Voyons ce qui est prévu dans le champ de la santé.

    La santé : une "priorité" très relative

    Dans le programme de 2024, sobrement titré : « Bardella Premier ministre », peu de mesures directes portent sur la santé. La santé est d’ailleurs en cinquième position dans le chapitre « Le Devoir de protection », après l’immigration, la défense du territoire national, le rétablissement de la sécurité et de la justice, la lutte contre la fraude… Une mauvaise position qui en dit long sur les priorités en santé publique du parti d’extrême droite. En propos liminaire aux mesures, l’extrême droite explique que la « crise sanitaire [comprendre celle de la Covid-19, ndlr] a révélé les insuffisances de notre système de soins et la vulnérabilité des patients souffrant de maladies chroniques et de comorbidités ». Ça, c’est le diagnostic en une phrase. « L’axe majeur de la politique de santé, outre la lutte contre les déserts médicaux dont quelques mesures ont été lancées dans le temps des urgences, sera de redonner confiance à l’hôpital public en lui fournissant les moyens pour être efficace et en réformant sa gouvernance », poursuit le parti extrémiste.
    Les mesures mises en avant sont les suivantes :
    - Réduire le poids des services administratifs dans les hôpitaux et transférer une partie des emplois vers les services opérationnels (plafond de 10 % de postes administratifs) ;
    - Supprimer les Agences régionales de santé (mettre lien sur l’autre papier spécial ARS) ;
    - Augmenter le nombre d’étudiants-es en médecine (fin du numerus apertus) ;
    - Lancer un plan d’autonomie stratégique pour les médicaments et mettre en place, à l’horizon 2026, la vente de médicaments à l’unité pour lutter contre les pénuries et le gaspillage ;
    - Renforcer le soutien aux proches-aidants ;
    - Donner plus de place à la prévention, notamment grâce aux visites médicales scolaires qui redeviendront systématiques ;
    - Reconnaître l’endométriose comme affection longue durée [alors que c’est déjà le cas : ALD 31, ndlr].
    Soit sept mesures, mais revenons-y.

    Vous reprendrez bien du désert!

    Le 24 juin dernier, Jordan Bardella, président du Rassemblement national (RN), principale formation politique d’extrême droite en France, présentait le programme de son parti pour les législatives, donnant ainsi des indications sur sa feuille de route personnelle, dans le cas où il serait choisi par Emmanuel Macron comme Premier ministre. La présentation de ce programme comportait plusieurs mesures sur la santé, déclinées rapidement à cette occasion. L’une concernait les déserts médicaux ; l’autre portait sur la suppression des agences régionales de santé (ARS). À l’instar d’autres formations politiques, le RN entend « faire face à l'urgence des déserts médicaux » avec plusieurs mesures : il veut supprimer l'impôt sur le revenu payé par les médecins et infirmiers-ères à la retraite qui reprennent une activité (mesure d’ailleurs prévue dans le projet de loi de finance rectificative 2024, qui pourrait être examinée durant la session extraordinaire, cet été) ; des incitations financières seront mises en œuvre afin d’inciter les professionnels-les de santé à aller dans des zones de déserts médicaux et cela « avec une rémunération basée sur des critères justes, de responsabilité, de pénibilité, et adaptée aux besoins des territoires ».
    Dans le programme présidentiel de 2022, Marine Le Pen avait déjà mis dans ses priorités la lutte contre les déserts médicaux. À cette fin, la candidate d’extrême droite voulait revoir « l’intégralité de l’aménagement » des territoires français. Elle prônait également la « démétropolisation », consistant en un « rééquilibrage entre les campagnes et les grandes métropoles afin de résoudre les problèmes de la fracture sanitaire, qui est de plus en plus importante ». Pour inciter les médecins à se relocaliser dans les campagnes, elle souhaitait mettre en place une rémunération de la consultation modulée selon le lieu d’installation, sans que les praticiens-nes n’aient de démarches spécifiques à faire. En parallèle, elle proposait d’ouvrir un nombre de places suffisantes dans les facultés de médecine. Le programme de 2024 comprend d’ailleurs la fin du numerus apertus — il désigne un nombre minimum d'étudiants-es admis-es en seconde année, étant individuellement fixé par chaque université en fonction de ses capacités d'accueil. Contrairement au numerus clausus, il n'y a pas de limite au nombre d'étudiants-es qui peuvent être admis-es dans une faculté de médecine.

    Une vision étroite de la prévention

    Dans le programme du RN, il est proposé de : « Donner plus de place à la prévention, notamment grâce aux visites médicales scolaires qui redeviendront systématiques ». Envisager la prévention principalement par le biais scolaire, et non tout au long de la vie, avec des approches spécifiques en fonction des publics et des pratiques, relève d'un manque flagrant de connaissance vis-à-vis de certains des besoins en santé publique et notamment de la réalité épidémiologique du VIH, des IST et des hépatites virales.

    Médicaments : la pilule ne passe pas

    « Lancer un plan d’autonomie stratégique pour les médicaments et mettre en place, à l’horizon 2026, la vente de médicaments à l’unité pour lutter contre les pénuries et le gaspillage », voici une des solutions proposées par le RN. Dans son analyse du programme santé du RN (21 juin), la Fondation Jean-Jaurès revient sur la volonté du RN de « sécuriser l’approvisionnement en médicaments ». Il note que le parti extrémiste privilégie une « libéralisation du marché du médicament » et ne détaille pas ses mesures concrètes dans ce domaine. « Pour la politique du médicament, le RN prévoit la vente à l'unité pour lutter contre les pénuries et gaspillages. Or, la pénurie de médicament n'est pas liée à des contraintes matérielles sur la production de médicaments qui ne pourraient être résolues que par un meilleur partage d'un nombre limité d'unités produites », expliquait récemment Nicolas Da Silva, chercheur au Centre d'économie de l’Université Paris 13, dans Alternatives économiques (2 juillet 2024). Cette question est aussi abordée dans une tribune « La poussée du RN menace notre système de santé » publiée par Libération (14 juin) à l’initiative de personnalités comme François Bourdillon, André Grimaldi, Julie Chastang, Olivier Milleron, etc.

    Prestations sociales : le RN pris en fraude!

    La mesure ne fait pas à proprement parler partie de la section Santé… elle est une section en elle-même ; mais il faut l’aborder car elle a des répercussions dans l’accès aux soins. Dans sa note, la Fondation Jean-Jaurès rappelle que le « RN dénonce régulièrement la fraude aux prestations sociales par les assurés-es, en ciblant dans le domaine de la santé non seulement les bénéficiaires de l’AME, mais l’ensemble des bénéficiaires d’aides sociales ».
    Rappelons donc quelques faits sur lesquels (et pour cause) l’extrême droite se montre peu diserte, indique la Fondation. Contrairement à ce qu’affirme le RN dans son programme, la fraude sociale est étudiée. Dans le dernier rapport de la Caisse nationale d’Assurance-maladie, elle est chiffrée à 500 000 euros pour l’AME en 2022, soit 0,0002 % des dépenses de santé. Pour comparaison, c’est l’équivalent du coût du traitement d’une hépatite C pour 22 personnes. La fraude à l’AME n’est pas plus élevée, en pourcentage, que la fraude au régime général, et elle est marginale, explique la Fondation. De plus, seuls 21 % du montant total des fraudes relevées par l’Assurance maladie émanent des assurés-es sociaux-les. À l’inverse, 68 % sont le fait d’offreurs de services et de soins (professionnels-les du soin…). Malgré cette réalité, l’extrême droite souhaite créer un ministère dédié à la lutte contre la fraude, ciblée sur les seuls-es assurés-es et dont les prérogatives interrogent, note la Fondation Jean-Jaurès. Il s’agit de permettre « aux organismes sociaux d’accéder aux fichiers utiles pour lutter contre la fraude ». « Un des risques (…) est d’ouvrir la porte à une conditionnalisation des aides à une série de critères. Par exemple, si l’on croise les données de santé avec le casier judiciaire des personnes, voire des enfants des assurés sociaux, alors il sera théoriquement possible de conditionner le taux de remboursement des soins à un casier judiciaire vierge, rompant avec les principes fondateurs de la Sécurité sociale ».

    Fin de l'AME : une obsession identitaire bien éloignée des intérêts de santé publique

    En plusieurs occasions, Jordan Bardella a réaffirmé la volonté du RN de supprimer l’aide médicale d’État (AME), couverture maladie destinée aux personnes étrangères sans titres de séjour valides. Fin 2023, quelque 466 000 personnes en bénéficiaient. Dans une de ses interventions, le responsable RN a dénoncé le fait que l’AME donnerait accès à la gratuité de « toute la palette de soins ». Ce qui est évidemment faux. Peu importe la vérité, il s’agit d’abord de faire croire aux Français-es qu’ils-elles seraient moins bien soignés-es (alors qu’eux-elles cotiseraient) que des personnes étrangères qui n’auraient jamais cotisé et pourraient cependant « profiter de tout ». L’argument est répété à l’envi par l’extrême droite, par la droite dite républicaine aussi ; même la majorité présidentielle a usé de cet argument (les propos du ministre Stanislas Guérini faisant croire que des opérations de chirurgie esthétiques étaient couvertes par l’AME). En réalité, exception faite des mineurs-es, dont les frais médicaux restent pris en charge à 100 %, certaines prestations sont exclues du dispositif AME, c’est-à-dire qu’elles ne font l’objet d’aucune prise en charge. On peut citer : les actes techniques, examens, médicaments et produits nécessaires à la réalisation d'une aide médicale à la procréation ; les médicaments à service médical rendu faible remboursé à 15 % ; les cures thermales, etc. Qui rappelle que les personnes éligibles à l'AME doivent résider en France depuis plus de trois mois, ne pas disposer de titre de séjour depuis plus de trois mois et doivent percevoir des ressources ne dépassant pas certains plafonds, que l’AME est renouvelée chaque année, etc.
    Dans sa note d’analyse du programme du RN pour les législatives, la Fondation Jean-Jaurès explique qu’en 2022, l’AME représentait seulement 0,968 milliard d’euros, soit 0,5 % des seules dépenses de santé en France. « Pour situer ce montant, il s’agit de moins de la moitié de l’enveloppe que le RN veut consacrer à l’augmentation des salaires des soignants (deux milliards d’euros). De plus, il promet de supprimer les subventions aux organisations non gouvernementales qui prennent en charge des migrants-es et pallient pour partie leurs besoins de santé, notamment dans le champ de la prévention ».  L’AME supprimée serait remplacée par une aide pour les soins urgents, dite aussi « aide d’urgence vitale ». « Mais attendre une situation d’urgence coûte cher à la collectivité : on parle ici de traitements spécialisés, de réanimation, de chirurgie en urgence. Ainsi, on estime qu’un accès tardif aux soins pour les personnes migrantes porteuses du VIH entraînerait un surcoût de 32 000 à 198 000 euros par personne comparé à une prise en charge précoce ! Ce nouveau dispositif serait donc plus coûteux pour la collectivité que l’AME, ce qu’étayent les études menées sur le sujet », indique la Fondation Jean-Jaurès. Enfin, deux arguments sont à prendre en compte concernant l’AME : elle ne crée pas « d’appel d’air, renforçant les dynamiques migratoires » comme l’a, de nouveau, démontré le rapport Evin-Stéfanini fin 2023 ; L’AME fait l’objet d’un taux de non-recours important, estimé entre 49 et 80 %. On est donc très loin d’une prise en charge automatique de l’ensemble des personnes en situation irrégulière comme le prétend l’extrême droite.

    Le fond de l'air effraie!

    Outre des mesures de fond, d’autres plus techniques (et qui posent néanmoins de sérieux problèmes), le péril tient aussi au « climat » qui serait instauré par la mise en œuvre éventuelle du programme de l’extrême droite et la désignation de cibles. Car des cibles, le RN en a toujours eu : les personnes étrangères au premier chef. Dans la phase 1 (le fameux « temps de l’urgence, été 2024), le RN veut la suppression de toutes les dérogations qui empêchent les expulsions de personnes étrangères. Le risque est l’exclusion de personnes vivant avec le VIH avec une OQTF (obligation à quitter le territoire français) vers leur pays d’origine. Il veut aussi le « retour du délit de séjour irrégulier » qui pourrait avoir pour conséquence une précarisation accrue de personnes déjà isolées, marginalisées, voire précaires. Sont aussi prévues la fin du droit du sol (une rupture complète avec le modèle républicain actuel), des restrictions en matière de regroupement familial, et la « suppression de toutes les régularisations de clandestins [dixit le RN] par les préfets ». Dans la phase II (cet automne), sont envisagées l’obligation de dépôt de demandes d’asile dans les ambassades et consulats, la mise en place de la préférence nationale, le fait de « réserver les aides sociales aux Français » et de « conditionner à cinq années de travail en France, l’accès aux prestations sociales non- contributives ». Les prestations sociales non contributives sont celles dont le montant n'est pas lié à une cotisation antérieure, mais à une situation particulière : charges d'enfants, niveau de revenu, maladie, hospitalisation, maternité, etc.

    D'autres groupes et personnes dans leur viseur

    Sont aussi visées les personnes détenues, tout particulièrement les personnes mineures. Dans les mesures de l’automne, on trouve le lancement d’un plan d’identification de lieux pouvant être reconvertis en lieux de détention de « basse sécurité » (pour les mineurs-es ou les personnes condamnées à de peines courtes) ; une réforme d’une partie de la justice des mineurs-es (abaissement de la majorité pénale à 16 ans, possibilité de comparution immédiate, etc.) ; l’instauration d’un principe de présomption de légitime défense pour les forces de l’ordre, etc. Le programme du RN, a l'image de ce qui avait été proposé en 2022 et antérieurement, repose sur une logique du « tout carcéral » et de la répression comme unique voie de recours. Les conditions de vie en détention s'étant largement détériorées (la suroccupation, tout particulièrement), augmenter, à la va-vite, le nombre de personnes incarcérées, dont des mineurs-es, risque d'augmenter la surexposition aux risques y compris sanitaires. Par ailleurs, il est plus que probable que l’accès à la RdR n’avance pas dans les lieux de privation de liberté sous une éventuelle mandature d’extrême droite (lire à ce sujet notre interview de lasénatrice écologiste de Paris, Anne Souyris (https://www.aides.org/actualite/lactu-remaides-interview-anne-souyris-).
    En matière de politique des drogues, tout tient en une phrase : « Durcir la lutte contre le trafic et la consommation de drogue » (page 11 du programme Bardella, Premier ministre). On le sait la lutte contre la consommation de drogues, non assortie d'une politique de RdR efficace et avec une nette orientation santé publique, aura des conséquences dramatiques sur les usagers-es (fermetures probables des salles de consommation à moindre risque et autres HSA, difficultés de poursuivre les actions de type CAARUD, stigmatisation accrue des consommateurs-rices et possible éloignement des structures accompagnantes, etc.). Enfin, on peut avancer (hélas sans se tromper) que les droits des personnes LGBT+ (en particulier les personnes trans), des travailleurs-ses du sexe ne s’amélioreront pas… Il est même envisageable au nom d’un « combat contre le wokisme », qu’on régresse nettement dans les droits (pourtant déjà lacunaires) des minorités.

    Une révolution conservatrice qui sent le vieux... Le très vieux

    On l’a bien compris (et même si Jordan Bardella prétend le contraire) la mise en place de cette politique se traduira par un recul de l’État (y compris de l’État de droit) et des pouvoirs publics. De fait, elle s’appuie sur l’idée fausse et de surcroit discriminatoire qu’il est possible de réduire la dépense sociale par la mise en place de la priorité nationale. Est aussi prévue la « simplification drastique » du « millefeuille territorial pour réduire la dépense et rendre du pouvoir aux élus de proximité ». Mises en œuvre, ces mesures annoncent un recul de l'État et des services publics, que ce soit par leur privatisation ou leur « allègement ». Ceci n'est pas compatible avec une volonté politique forte de déployer sur tout le territoire des politiques de santé publique efficaces et efficientes, à l'écoute des besoins réels des personnes. Par ailleurs, les territoires ultra-marins ont, au contraire, besoin d’un net renforcement des services publics, tout comme les zones très rurales ou les quartiers particulièrement défavorisés. Restreindre l'État à ses fonctions régaliennes n'est pas compatible avec ce qu’il convient de faire aujourd’hui en matière de santé.
    Au fil des pages du programme du RN, on trouve de nombreuses idées ou pistes qui signent la volonté de faire de cette possible alternance, l’acte 1 d’une révolution conservatrice, voire illibérale (du genre de la Hongrie d’Orban, de l’Italie de Méloni, de la Pologne période Pis et Kaczyński, des États-Unis de Trump, du Brésil de Bolsonaro, etc.) : recentrage des enseignements sur les savoirs fondamentaux ; création d’une législation spécifique visant les idéologies islamistes, qualifiées de « véritable menace totalitaire des temps modernes » ; accent mis sur la natalité ; défense éhontée de traitements différenciés qu’on soit ou non français-e ; réserver au peuple seul, par référendum, le pouvoir de modifier la Constitution (exit le Parlement) ; privatiser l’audiovisuel public ; enraciner les familles françaises et autre Préserver  la civilisation française (« de souche », on imagine)… Il suffit de lire les programmes et les tracts électoraux, d’entendre les discours de tribune et les interviews pour comprendre que la vision de la société proposée par le RN s'oppose parfaitement aux paradigmes de tolérance, de vivre ensemble, d'accueil, d'émancipation. Il est à craindre que les minorités ne s'inscrivant dans ces schémas voient leurs droits reculer, comme on l’a vu. Si des propositions concrètes dans ce sens ne sont pas évoquées clairement dans le programme, considérer la famille nucléaire hétéronormée comme l'alpha et l'oméga de la persistance de la Nation se heurte aux modes de vie, parfaitement légitimes, d'une partie des publics que nous accompagnons.

    Docteur, c'est grave?

    Comme on le voit, la politique de santé à la sauce RN comporte son lot d’incohérences et d’approximations. Pire, bien des fois, elle semble frappée au coin du bon sens, voire même attrayante, alors qu’elle exclut des pans entiers de la population. Par idéologie, elle discrimine du fait de l’appartenance réelle ou supposée à certains groupes. Elle prétend résoudre les problèmes de santé des uns-es et faisant courir des risques à d’autres. De fait, c’est collectivement que nous serions exposés-es à des choix extrémistes qui entretiennent les inégalités d’accès aux soins, qui rompent avec les idéaux républicains et les valeurs, y compris déontologiques des professionnels-les de santé… Que des malades, des associations de santé et de défense des droits des minorités, des syndicats professionnels de soignants-es, des sociétés savantes, des équipes de recherche médicale, des fédérations hospitalières, des médias de santé, etc. s’alarment des mesures préconisées par l’extrême droite et de la « philosophie » qui les sous-tend est un signe. Docteur, c’est grave ?